L’UE entend atteindre la neutralité carbone ou zéro émission nette d’ici 2050 : voilà ce qu’elle est et quelle est la différence avec zéro émission.
Comme le confirme le dernier rapport rédigé par les scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations Unies, le réchauffement climatique que nous vivons a une origine anthropique, c’est-à-dire qu’il est déclenché par les activités humaines. Plus précisément, les émissions de gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone (CO2), le méthane et d’autres catalysent le changement climatique. Pour éviter les effets les plus catastrophiques du climat « exaspéré » à cause de nous, les experts indiquent qu’il faut contenir l’augmentation de la température moyenne à 1,5°C près par rapport à l’ère préindustrielle ; pour le moment nous sommes à 1,2°C et si nous ne prenons pas des mesures immédiates et drastiques contre les émissions de ces gaz nous dépasserons non seulement ce seuil, mais d’ici 2100 nous risquons même d’atteindre une augmentation de 2,7°C, comme le souligne de la nouvelle étude Climate Action Tracker (CAT) présentée à la COP26. Pour lutter contre le réchauffement, il est nécessaire de réduire immédiatement et drastiquement les émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre, dans le but d’atteindre le plus rapidement possible le zéro émission nette, ce que l’on appelle le « Net Zero » – ou neutralité carbone/climatique – dont on entendre parler. Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Tout d’abord, il faut souligner que les termes zéro émission nette, zéro net ou neutralité carbone ne signifient pas du tout zéro émission. Éliminer complètement les émissions de composés carbonés, comme le dioxyde de carbone et le méthane, parmi les principaux gaz à effet de serre, est en effet pratiquement impossible. Mais les émissions peuvent être réduites et compensées jusqu’à ce que les émissions nettes zéro susmentionnées soient atteintes, une sorte d’équilibre entre les gaz à effet de serre rejetés dans l’atmosphère et ceux captés ou « séquestrés ». Comme le précise le Parlement européen dans un communiqué, la neutralité carbone consiste à atteindre un équilibre « entre les émissions et l’absorption de carbone ». « Lorsque le dioxyde de carbone est retiré de l’atmosphère – poursuit la déclaration – on parle de séquestration ou d’immobilisation du carbone. Pour atteindre cet objectif, les émissions de gaz à effet de serre (GES) devront être contrebalancées par l’absorption des émissions de carbone ».
Et comment compenser et équilibrer les émissions qui continueront inévitablement d’exister ? Tout d’abord en exploitant de plus en plus d’énergies renouvelables (éolien, solaire, hydroélectrique, géothermie, houle etc…) ou le nucléaire de dernière génération lorsqu’elles sont disponibles, d’autre part en captant le carbone déjà présent dans l’atmosphère. Il faut en effet garder à l’esprit que le dioxyde de carbone et autres gaz à effet de serre s’accumulent jour après jour dans l’atmosphère, et c’est précisément cette « hotte » qui déclenche le changement climatique. Atteindre la neutralité carbone ou émission nette zéro signifie ne pas ajouter plus de carbone à celui déjà présent, étant donné que cet élément, selon les calculs des experts, reste dans l’atmosphère entre 300 et mille ans. Malheureusement, il n’existe pas de méthodes artificielles efficaces pour capturer le carbone atmosphérique, mais nous avons des puits naturels tels que les forêts, les océans et le sol. Comme précisé par le Parlement européen, ces puits naturels ont la capacité de séquestrer jusqu’à 11 Gigatonnes de CO2 par an ; cependant, en 2019, les émissions mondiales de dioxyde de carbone étaient plus de trois fois supérieures à cette capacité de « stockage », soit égales à 38 Gigatonnes. C’est pourquoi la protection des forêts, la repousse de celles détruites, la plantation de nouveaux arbres et la lutte contre les incendies (qui dégagent une énorme quantité de CO2) sont essentiels pour améliorer la capacité d’absorption des émissions résiduelles. Mais les émissions de CO2 doivent être réduites maintenant, car il n’y a plus de temps, comme en témoigne l’horloge climatique.
Comme le souligne Climate Action Tracker, bien que plusieurs pays présents à la COP26 aient conclu des accords importants pour atteindre la neutralité carbone d’ici le milieu du siècle ou peu après (États-Unis et UE en 2050, Chine et Russie 2060, Inde 2070), le problème est que personne ne s’est engagé à réduire fortement et immédiatement les « contributions déterminées au niveau national » ou les NDC, ou les émissions à court terme, d’ici 2030. Selon le rapport CAT, même si nous atteignons la neutralité carbone d’ici 2050, si nous continuons à polluer fortement dans la prochaine décennie non seulement dépasserons-nous bientôt 1,5°C de réchauffement, mais nous atteindrons 2100 à 2,4°C voire 2,7°C, avec des conséquences catastrophiques pour l’environnement et l’humanité. Enfin, il faut garder à l’esprit que l’UE par neutralité carbone veut dire celle qui concerne tous les gaz à effet de serre émis dans l’atmosphère, y compris le méthane et le protoxyde d’azote, alors que la Chine uniquement le CO2, donc il y a encore beaucoup à travailler sur des accords.